mercredi, février 21, 2007

"Encore" deux rives une frontière.



"Comment imaginer alors, qu’une fois installées de part et d’autre des frontières, nos vies, vaquant à leur raison propre, allaient non seulement s’éloigner, mais s’atteler à d’autres desseins jusqu'à en diverger dans leurs buts ultimes.
Toi pour un impossible départ vers je ne sais où, rêve entre mer et ciel, océan improbable, moi à qui trop de retours ont brisé l’espoir du seul vrais et possible retour, laissé là, vacant, à l’endroit même où nos vies furent à jamais interrompues.


-Donner peut consoler de ce qu’on ne reçoit pas, vous combler même,
de l’autre côté du geste on s’imagine toujours comme un destinataire possible. Oui possible, mais seulement possible. De la bonne adresse des choses dépend, qu’elles arrivent ou pas à destination… Combien de lettres ne reviennent ou se perdent à jamais?


Sur le quai de la gare quelques minutes avant son départ: (bribes)
-Oui mais je vous dit qu'elles continuèrent de partir même si la réponse n
’est jamais venue. L’avez reçue la dernière ?
-"La dernière ?! Mais quelle dernière puisque je vous dit que je n’ai jamais rien reçu ?"


J’avais quitté ma ville natale de Trieste sur les bords de la côte adriatique,
à la fin des années trente et ce petit échange n’aurait pu avoir lieu que
parce qu’un petit événement, est venu se glisser, ce jour-là,
au cours normal des choses.
Lorsque je reçus de la main de la secrétaire les papiers
que j’étais venu me procurer dans cette administration près du port,
je n’ai pu contenir ce qui fut bien plus qu’un mouvement de surprise,
celle qui était là face de moi n’était autre qu’Anna M., quinze ans plus tard. "

Buenos Aires février 1955
DH


Fragments d’un journal que D.H. a tenu entre janvier 1943 et décembre 1957 peu avant sa mort en Argentine.